Gégèle de la Vacheresse
Nous avons réalisé un premier entretien, le 28 mars 2019 avec Marie-AngèleTAFFOREAU née CONNAN , chez elle au plateau de Belleville autour d’une tarte et d’un café. Puis le 19 janvier 2023 à La Vacheresse.
Thérèse Bouvet et André Lacheny
… elle raconte…
Je suis née le 19 janvier 1947 à Orsay. Les gens qui me connaissent bien m’appellent souvent Gégèle, surnom que m’a donné mon petit frère Gérard qui avait 18 mois de moins que moi et qui n’arrivait pas à prononcer mon prénom.
J’habitais à La Vacheresse avec mes parents, ma grande sœur Blandine et mon petit frère Gérard, la maison mitoyenne à côté de chez M. et Mme ROUSSEAU, qui ne venaient que le week-end, à mon grand regret car c’étaient les seuls moments où je pouvais jouer et faire du vélo avec leur fille de mon âge, Mylène (Marie-Hélène).
Des grand-mères adorables
Moi qui n’avais pas connu mes grands-parents, ici, j’étais entourée de grand-mères adorables : en face, à la ferme, les grands-mères CINEAU et LACHENY, sur la droite de notre maison était l’ancien café « chez Nana » divisé en deux logements où demeuraient dans l’un Madame BOUFFAUD (NANA) et dans l’autre la grand-mère DIEU. Enfin, en face, la grand-mère Claire TOQUET (maman de Suzanne BESSADA).
La Vacheresse, c’était une grande famille chaleureuse : si l’un manquait de sucre, de farine ou autres, on n’avait qu’à traverser la route.
Mes parents, pour le plaisir, avaient des poules, des canards qui traversaient allégrement la route à la queue-leu-leu pour rejoindre la mare qui se trouvait sur la place juste en face de chez nous, un chat, Mister Flute, le chien Mickey et…
Jérôme, le cochon.
Ah, celui-là , c’était un phénomène !
Il était très propre, se promenait partout dans la maison et gobait des œufs. Papa, qui travaillait chez Monsieur HOTTIN (ferme de la Feuillarde), lui ramenait chaque soir un ballot de paille que l’on étalait afin qu’il puisse dormir dans la petite grange attenante à la maison. Et le matin, lorsque le boulanger klaxonnait, au croisement, pour livrer le pain, Jérôme suivait maman.
Cache-cache
Une petite anecdote avec le chien Mickey : Un jour, l’été de mes 3 ou 4 ans, je me suis cachée au fond de la niche, Mickey est venu s’installer devant moi, mes parents et les voisins, très inquiets m’ont recherchée un peu partout, notamment dans les champs de blé qui n’avaient pas été encore moissonnés.
Les commerçants ambulants
A cette époque, des commerçants passaient dans les hameaux, le boulanger , pratiquement tous les jours, 1 fois par semaine le charcutier, Monsieur COUSSOT, 2 épiciers , Monsieur LOSCO et un autre, Monsieur MORAINVILLIER. Je me rappelle que ce dernier distribuait des bons avec une marque de café avec lesquels on pouvait s’offrir de la vaisselle.
D’autres commerçants passaient de temps à autre : un poissonnier, un marchand de linges de table et même une glacière de Gometz le Châtel.
A la ferme, les soirs d’hiver, la famille LACHENY triait des haricots et je me souviens avoir vue Thérèse, petite fille de 2 ou 3 ans à l’époque, assise sur la table, quelquefois même sur son pot ! Je me souviens aussi de Léon souriant venant nous présenter Ginette, sa future femme ; du grand-père Lacheny aiguisant sa faux en dessous de la boite aux lettres
On allait pêcher des grenouilles dans la mare de Monsieur et Madame ROUSSEAU et Madame TOCQUET nous les faisait sauter à la poêle avec de l’ail et du persil.
L’école, par tous les temps
Nous allions et revenions de l’école à pieds par tous les temps. Le pire, c’était l’hiver ! Nous portions, à cette époque, des capelines (sorte de manteau sans manches), des chaussettes en laine et des galoches en bois. Pas facile de marcher dans la neige avec cet accoutrement, surtout qu’en plus, nous avions notre cartable et notre gamelle pour le midi. Des congères se formaient souvent près du hangar de Monsieur LEBRUN à Beaudreville et quelquefois, avec tout cela, nous étions déséquilibrés et… nous tombions. Nous arrivions à l’école (ou à la maison) gelés et nous allions vite nous réfugier près du poêle.
Notre institutrice, Madame CORNIC, était sévère, mais aussi très gentille. Mon petit frère et moi déjeunions à l’école, nous mettions un papier sur nos pupitres, Madame CORNIC nous aidait pour chauffer notre gamelle sur le poêle de l’école et nous surveillait. Dès le printemps, nous retournions déjeuner dans le réfectoire.
Certains matins, avant de partir travailler à la ferme de Monsieur HOTTIN, maman nous accompagnait à l’école, avec son vieux vélo. Un enfant sur le guidon, l’autre sur le porte bagage et en plus, toujours les cartables et la gamelle !
Carlo, ange-gardien
Souvent, Carlo le chien de la ferme HOTTIN, nous rejoignait à hauteur du hangar de Beaudreville, en passant par la mare Jodoin et divers chemins. Il nous suivait jusqu’à l’école . Je me suis toujours demandée comment il pouvait savoir l’heure à laquelle nous allions en classe ? Un jour, un cantonnier nous adressa la parole au niveau du château d’eau (détruit qui était situé face à l’Allée du Verger). Carlo a cru que nous étions en danger et a chiqué sa fesse ! Nous avons compris qu’il nous protégeait.
Un p’tit canon
Amenés par des associations, des clochards venaient faire les saisons de pommes de terre, de petits pois… Ils dormaient dans la paille des hangars et nous faisaient peur à nous les petits. Quelquefois, l’un d’eux venait à la maison chercher un « p’tit canon ».
C’était mon enfance, et même si la vie n’était pas toujours facile, c’était le bon temps !
Je suis partie de La Vacheresse à 19 ans pour suivre mes parents qui s’étaient installés au Perray en Yvelines.
Je me suis mariée en 1971 et depuis nous habitons sur le plateau de Belleville.